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18 mai 2017 4 18 /05 /mai /2017 09:34

 

Il arrivait à Brian d’être subjugué par une femme, d’être fasciné, comme si une âme émergeait d’un visage et d’un corps et lui apportait la conviction qu’avec elle, il ne serait plus seul, la vie serait belle et aurait un sens.  Ce n’était pas une question essentiellement sexuelle. Il existait d’innombrables femmes qui plaisaient sexuellement à Brian, mais par une sorte de malédictions seules ces femmes excitant son corps tout en laissant son âme indifférente lui étaient accessibles. Une fatalité répandue ne lui donnait la chance d’éprouver un coup de foudre que tous les 10 ans. Ce n’était pas, alors, un après-midi qu’il lui fallait pour être subjugué, aimanté, ne plus penser qu’à cela, et vivre cette étrange impression que toute la vie, l’essence et la beauté de la vie étaient circonscrites en une seule femme, c’était quelques secondes. Brian pensait qu’une histoire avec un être comme cela lui échapperait toujours. Pourtant il aurait donné sa vie sans hésiter pour une relation de ce type, car elle seule lui aurait donné l’impression de ne plus être seul, et aurait contribué à donner une signification à ce chaos sanglant dominé par la lutte. Il avait été frappé par la foudre une quinzaine d’années auparavant, dans un restaurant universitaire. Il discutait avec des comparses philosophes quand il la vit, une asiatique, mangeant avec d’autres étudiants. Et il avait été foudroyé. Les discussions philosophiques paraissaient si vides, de si peu d’intérêt à côté. Etrange impression. Il l’avait peut-être vue 20 minutes en tout, et il y pensait encore.  Et puis récemment, il avait été fasciné par la beauté et le charme d’une jeune asiatique, aperçue dans un train. Elle était accompagnée d’une femme plus âgée, également asiatique. Il l’avait suivie un peu dans la gare, admirée, ne pouvant en détacher le regard. Pourquoi était-ce si rare les filles comme ça ? Et il avait interrompu sa contemplation pour ne pas rater un changement de train. Il y pensa ensuite, très triste, déchiré, et les vers de Nerval lui revinrent :

 

« Elle a passé la jeune fille

   Vive et preste comme un oiseau

   A la main une fleur qui brille

   A la bouche un refrain nouveau

 

   Elle était peut-être la seule au monde

   Dont le cœur au mien répondait

   Qui venant dans ma nuit profonde

   D’un seul regard l’éclaircirait

 

   Mais non, ma jeunesse est finie

   Adieu doux rayon qui m’a lui

   Parfum, jeune fille, harmonie

   Le bonheur passait, il a fui ».

 

Bon sang, qu’il avait le cafard. On ne peut être un guerrier indéfiniment, ou qu’un guerrier. Il faut une raison de lutter, aussi, sinon le cœur s’assèche et à quoi bon ? Et puis, il ne lui restait plus beaucoup de temps. Du temps pour vivre, faire des rencontres, se libérer, et pouvoir quitter ce monde sans regrets, apaisé et rassasié. Et merde, il n’avait que trop lutté. Il n’avait, même, que lutté.

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