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12 juillet 2017 3 12 /07 /juillet /2017 14:01

 

La vie ne présente un intérêt, pour un homme, que tant qu'il peut séduire de belles jeunes filles. Passé ce cap, il n'y plus de but! Le titre d'un roman de Romain Gary, "Au delà de cette limite, votre ticket n'est plus valable" l'exprime très bien.

Parfois, Brian était submergé par des images violentes, qui lui semblaient détruire son individualité, et sous emprise de ces associations mentales, il entrait en état de sidération, de profond malaise, de prostration. Il s'était intéressé à différentes thérapies pour soigner ses blessures. Mais il semblait trop complexe pour entrer dans le monde des thérapies calibrées. Il avait côtoyé une association de cognitivo comportementalistes, mais leurs théories s'avéraient sans profondeur, et leurs partisans d'un esprit sectaire, et très limités intellectuellement. Il avait fait connaissance avec un type dont la mère l'étouffait, et qui d'ailleurs voulait le faire lobotomiser à la manière actuelle, à savoir lui planter des électrodes empêchant de penser dans le cerveau pour être moins envahi de troubles compulsifs. Procédé terriblement invasif pour une pathologie dont quelques séances de sport diminuent l'impact, et qui surtout occulte la véritable origine des problèmes, en l'occurrence la mère. Cette mode normative des TCC se veut en phase avec une société où les individus doivent s'adapter coûte que coûte plutôt que se trouver eux-mêmes. Mais un type qui procède à des rituels excessifs, ce que nous faisons tous dans une moindre mesure pour donner un semblant de régularité au chaos et à l'imprévisibilité menaçante, sait très bien qu'il n'y a pas de causalité entre ses exercices et le but recherché. Mais plus encore qu'un accident survenant s'il ne s'y livrait, la face négative, il croit sans en être dupe que s'y livrer le protège, ainsi que ses proches, la face positive, et c'est cette illusion protectrice qui l'enchaîne, et qui le pousse à ses rituels excédants. Or, comme il sait que ses schémas de pensée sont absurdes, ce n'est pas là-dessus qu'il doit travailler, mais bel et bien sur l'angoisse à l'origine de ces symptômes, car sa présence le contraindra toujours malgré sa rationalité, et tant que le besoin pathologique de protection dominera. Les psychanalyses l'emportent donc sur les TCC, et leurs chefs de file, ces nullités intellectuelles fermés à toute philosophie.

La mode du retour à la méditation, popularisée sous le terme de "mindfulness" ou "pleine conscience" est plus stimulante. Par exemple, observer ses associations d'idées pour prendre de la distance et ne plus s'y enchaîner est une expérience libératrice. Et puis méditer sans dépendre de traditions, bouddhisme, hindouisme, taoïsme, envers lesquelles on peut émettre de sérieuses réserves. Mais il y a un côté agaçant dans son omniprésence, son manque de recul critique, son déracinement de la philosophie et de la sociologie. Christophe André, Matthieu Ricard, le Dalaï lama (aucune sagesse), Thich Nath Han, Fabrice Midal, Frédéric Lenoir, comme autrefois Krishnamurti, Aurobindo ou Arnaud Desjardins, écrivent des dizaines de livres, où ils ressassent les mêmes niaiseries et platitudes, comme Eckart Tollé, Paulo Coelho ou Laurent Gounelle dans un versant développement personnel. Il y a même un aspect réactionnaire très fort chez Christophe André, un esprit bigot, moralisateur qui exaspère, et un rejet de la psychanalyse à laquelle il n'a rien compris (rapport névrose et sexualité, phobie et impossibilité de s'autonomiser psychiquement par ex), et dont il semble avoir bien besoin. Ferait mieux de s'occuper de la poutre dans son œil que de nous soûler avec ses conseils éternellement ressassés et infantiles. Quant à ce pauvre Fabrice Midal louant les vertus de la reine des psychotiques, Sainte Thérèse de Lisieux, occultant sa folie au profit d'une valorisation médiatique toute récente du mysticisme, c'est sombrer si bas qu'il n'y a sans doute plus d'espoir pour lui.

Et puis tous insistent sur l'instant présent, qui n'existe pas. Il n'y a que de l'impermanence, du changement, des mutations comme nous l'enseignent Héraclite, Bergson ou le YI King. La "sensation" de coïncider avec l'instant, à la rigueur, peut être la conséquence d'une saine actualisation de puissance, d'une adéquation maximale entre ses possibilités et ses réalisations, mais elle ne doit pas être recherchée pour elle-même, comme cause d'un bonheur factice. C'est forcer les choses, mettre la charrue avant la bœufs, un crime contre la logique naturelle.

Brian avait aussi entendu vanter, dans un séminaire de "pleine conscience", la sagesse des peuples africains qui seraient épanouis parce qu'ils vivraient l'instant présent. En réalité, les membres de communautés traditionnelles sont toujours pris dans un flux d'interactions qui les éveillent. Ils font ce qu'ils ont à faire, poussés par la nécessité. Ils ne souffrent pas de la solitude que nous connaissons et leur bonheur vient de là.

Heureusement, il existe des êtres qui ont réellement quelque chose à dire, et parmi ces exceptions, Brian appréciait la thérapeute Alice Miller, le psychiatre Irvin Yalom, l' iconoclaste François Roustang. Bien sûr, il ne partageait pas toutes leurs vues, mais il leur accordait du crédit. Des êtres à qui on allait laisser la vie sauve! Du moins pour les survivants.

Toutes ces images qui assaillaient Brian, d'où venaient-elles? D'une succession de violences subies, d'un traumatisme originel plus ancien, d'un moment fondateur, fragilisant, que des épisodes déstructurants avaient renforcé, jusqu'à l'écoeurer de l'humanité, l'en éloigner et lui rendre impossible le retour, les groupes humains lui évoquant l'annihilation de sa personnalité, sa négation, et son extraordinaire intelligence la refusant? Il avait parfois de lointaines réminiscences, des résurgences, de quelque chose de peu clair et d'enfoui, d'enfui. Et il n'avait pas pu le colmater. Sans "témoins secourables", il avait toujours été extrêmement seul. Peut-être la nature le voulait-il ainsi! Sans réciprocité, il s'était formé, avait fructifié ses dons, avait surcompensé l'absence, mais soutenu, compris, écouté, ne se serait il pas arrêté en chemin, inhibant sa pensée et la modelant sur les préjugés, les opinions dominantes, se contraignant avant l'émergence de l'originalité et du danger? De toute façon, quelques soient ses causes et  ses effets, cette solitude l'avait contraint au malheur. Quant à sa puissance? N'y avait-il pas une place à trouver pour les gens comme lui dans une société si coercitive et médiocre, un lieu, un espace où et se faire comprendre, communiquer? Un mont analogue?

Le sens de la vie le bonheur, car sans recherche de justification, de sens, donc immersion dans le sens, coïncidence avec le sens, donc avec le temps. Le bonheur la vraie définition de vivre l'instant présent, car coïncidence avec le temps, pas de temps perdu., et pour Brian vivre l'instant, être heureux, le sens, tuer des malfaisants!

 

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