L’actualité agaçait Brian. Toute cette fumisterie Etatique et médiatique.
Sur les chaînes d’info en continue, on voyait défiler en bas de l’écran « Alexia a été autopsiée. Elle a été étranglée, mais pas violée ». En quoi ça nous concerne ? Pauvre Alexia ainsi exposée, quel sort on te fait, quelle indécence !
Et puis, l’Etat qui légifère la prostitution étudiante ! Mais si les filles ont besoin d’argent, quelle autre solution l’Etat leur propose t- il ? Il leur faudra postuler pour des emplois précaires, ou elles se feront lobotomiser pour un salaire de misère, et qui chronophages, nuiron tà leurs études. N’est-ce pas préférable de batifoler avec des messieurs distingués, et avantageux de part et d’autre ?
Et puis, toujours cette injustice de la justice. Si 90 pour cent des prisonniers sont issus de classes sociales défavorisées, alors il s’agit de statistiques, et donc non de libre arbitre mais de conditions socio-économiques. Un riche aura moins besoin, ou envie, de voler, et s’il vole, il s’y prendra différemment.
Quant au trafic de drogue dans les quartiers, il est voulu par l’Etat puisque, sans cet apport et sans travail, ce ne serait pas vivable pour les habitants.
Hypocrisie des institutions là encore, qui stoppent un petit trafiquant d’armes, mais laissent à d’autres la vente d’engins autrement plus destructeurs.
De même le viol, soi-disant pénalisé, est favorisé dans certains milieux, comme les prisons, où les conditions l'encouragent, avec l’aval de l’Etat.
Et cet Etat qui récompense les « héros » morts ou blessés au combat quand le seul type vraiment courageux est le déserteur, qui refuse de perdre vie, bras et jambes pour de vains idéaux et d’infâmes capitalistes, évêques et ministres. C’est d’ailleurs symptomatique qu’un régiment soit reconnu au nombre de ses morts. Plus la proportion de ses hommes sont tombés au combat, plus le régiment est vu comme héroïque, alors qu’il s’agit plutôt de benêts, ou de lâches soumis et dociles, incapables de révolte.
Quant à cette ministre qui fustigeait les profs démissionnaires de Saint-Martin, qui selon elle méritaient une leçon, qu’elle aille se faire foutre, comme cette monstrueuse machine à abrutir, à formater, à adapter donc à soumettre qu’est l’éducation nationale. Les profs, comme les chauffeurs de bus, ne sont pas payés pour se faire tuer.
Brian avait entendu lors d’une émission de radio des scientifiques qui s’inquiétaient d’une baisse de QI de 7 points ces dernières années, et voyaient un lien avec l’omniprésence des produits chimiques. Mais il semble évident qu’on ne peut pas regarder Hanouna, Sébastien, Arthur ou Coe, Koh Lanta et la TV réalité, et la bouffonnerie constante, sans que le QI en pâtisse.
On critique l’élitisme, mais si l’élitisme, c’est aimer Proust, Dostoïevski ou Pasolini plutôt que la TV réalité, alors c’est s’orienter vers ce qui est bon, et si la culture populaire ne s’élève pas et se complaît dans la médiocrité et l’abject, pourquoi devrait-on la louer ?
Parfois, quelque chose de positif émergeait, et même les best sellers pouvaient être bons.
Ainsi Brian appréciait les deux ouvrages de Harari, « Une brève histoire de l’humanité : Homo Sapiens », puis « Homo Deus ». Harari développe nombre de perspectives démystifiantes, notamment sur les mythes, l’humanisme, la liberté, l’égalité, les droits de l’homme, la place de l’homme dans l’Univers. Il expose la cruauté sans limites de l’humain vis-à-vis du monde animal, déconstruit nos croyances. Il argumente à l’aide de l’histoire et de la science, quand Brian se sert de la philosophie et de la science, mais tous deux parviennent aux mêmes résultats, et appuient les travaux d’illustres prédécesseurs, comme Montaigne, Spinoza, La Mettrie, Schopenhauer, Darwin ou Freud, en certaines de leurs intuitions révolutionnaires.
« Aimez-vous les uns les autres », « Aime ton prochain comme toi-même », des injonctions qui semblent louables à la plupart des hommes, et qui sont néanmoins contre-nature. D’abord, qu’est-ce que le prochain ? Tous les hommes ? Il faudrait donc s’efforcer d’aimer tous les hommes de la même manière, avec une semblable intensité ? Freud pensait que c’était impossible, et que chercher à s’y conformer rendait malade. Brian le pensait aussi. On a ses préférences, et c’est bien naturel, c’est animal.
On dit que pour aller mieux, il faut aider les autres, c’est donc pour soi-même qu’on le fait, par pur égoïsme. Chercher à aider si on n’en a pas le désir peut être contre- productif.
Il y a les toiletteurs, et il y a les toilettés. Mère Teresa, comme Brian l’avait entendu dire par une orpheline indienne enlevée, n’était pas une sainte. C’était une catho intégriste qui vendait des petites filles.
Les sages s’accordent sur le fait qu’à l’origine de tout, il y a l’amour. Ca se discute. Ce qu’on observe, ce qu’ont bien dévoilé Schopenhauer et Darwin, c’est plutôt une lutte constante. Lorsque des morses ne peuvent s’accoupler avec des femelles accaparées par un mâle dominant, ils sont si frustrés qu’ils tentent de s’accoupler avec des pingouins, puis ils les dévorent. Où est l’amour dans tout ça ?