Brian revit Clara lors d’une rencontre avec un groupe de danse autour de l’eutonie. Ils échangèrent quelques mots. Il essaya d’observer ses propres réactions, sentiments, de ressentir ce qui se passait en lui, ses émotions, avec Clara. D’un côté, il avait espéré qu’elle ne serait pas là, tout en sachant que ce serait vide sans elle. Il chercha à comprendre, encore, les raisons de son intérêt. Finalement, elle était belle, mais ce n’était ni son physique, ni sa voix qui le poussaient vers elle. Une apparence plaisante comme une jolie voix, ça se déclinait par millions. Il avait pensé à son inaccessibilité, mais ce n’était pas ça non plus. D’autres femmes ne s’intéressaient pas à lui, mais elles lui étaient indifférentes et il s’en contrefoutait. Il recommencait à se détacher, à s’ouvrir à d’autres femmes, mais dès qu’il la revit, ça le reprit et il rêva d’elle toute la nuit.
Le lendemain, il crut appeler une amie, et il téléphona à Clara, un acte manqué, ou réussi selon son inconscient. Il s’embrouilla et s’excusa. Il ne voyait que deux, trois possibilités à son irrésistible attraction. D’abord, sans être nécessairement complémentaires, ils étaient sur une longueur d’ondes physique et spirituelle commune, et comme c’était rare, il ne pouvait en détacher son esprit. Ensuite, il y avait sa présence. Impossible de nier que sans elle, c’était vide, avec elle, plein, que sa seule présence et son aura suffisaient à amener la vie, à donner de l’intérêt à la vie, qu’elle était donc quelque part la vie pour lui. Enfin, pourquoi Elle ? Après tout, elle ne devait pas donner cette impression à tout le monde. Il y avait sans doute une part qui lui était intrinsèque, son charme propre, combiné à une part d’inconscient qui venait de lui. Peut-être lui rappelait-elle des femmes, comme Chrystelle, qu’il avait aimées autrefois, et il en était comme aimanté. Que pouvait-il faire ? Résister ? Chasser les images mentales ? Elles s’imposaient. Peut-être son inconscient, ou des forces de vie en lui ne voulaient pas qu’il l’oublie, ne voulaient pas qu’il fuit ses impressions et les modifications qu’elles lui apportaient.
Il repensa à la chanson « Tu veux ou tu veux pas ? Si tu veux, c’est bien, si tu veux pas, tant pis, j’en ferais pas une maladie ». Eh bien, elle voulait pas, et ça le rendait malade. Jamais une femme ne l’avait tant inspiré. Tout le ramenait à elle, et il y revenait malgré lui. Il avait beau essayé d’analyser, de comprendre, de prendre de la distance, elle s’imposait. Il lui faudrait méditer pour retrouver un peu de sérénité. Son amour pour elle le rendait vulnérable, et il perdait en forces ce qu’il gagnait en humanités. Ca pourrait le faire progresser pour la suite, mais pour l’heure, ça l’anéantissait. Plus rien ne comptait qu’elle, sa présence, sa compagnie. Il était amoureux. Ca passerait avec le temps. Il fallait couper les ponts, réduire les occasions de rencontres et d’échanges, écouter les conseils pour une fois. Il fallait se préserver, se sauver soi-même. Même quand il dansait seul, il l’imaginait parfois danser en parallèle, son charme en mouvement. Il aurait aimé danser avec elle, la filmer et la mettre en valeur. Il la croyait capable d’exprimer quelque chose qui lui était propre. Il en était capable aussi. Ils partageaient cette force et cet élan, une grâce visible et communicative, une distinction, une originalité, une puissance. Ce n’était pas donné à tout le monde. Ils étaient spéciaux, deux bêtes bouillonnantes contenant avec peine leur besoin d’expression. Et s’exprimant, envers et contre tout!