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25 juin 2018 1 25 /06 /juin /2018 23:03

« Il y a plus de choses sur la Terre et dans le Ciel, Horatio, que n’en peut rêver votre philosophie. »

Clara réalisait ses rêves en reliant toutes ses aspirations, la nature, l’écologie, la coopération, la bienveillance, la spiritualité, la création artistique, la peinture, la photo, la vidéo, l’écriture, la danse, la mise en relation des personnes et des groupes, et elle favorisait les contacts humains, animaux, végétaux, relié au Tout, dans une vision Panthéiste ou Chamanique. Elle était davantage tournée vers les vies ordinaires que Brian, plus stimulé par les vies extraordinaires. Chaque vie comporte des événements, mais TE Lawrence, London, Balzac ou Von Humboldt ont eu un parcours tout de même plus captivant et ont une complexité plus attractive qu’une « vie minuscule » à la Michon. Il ne partageait pas cette mode de valorisation de la vie ordinaire. Il aimait les aventuriers du corps et de l’esprit. Clara en était d’ailleurs. Ceux-ci risquent, mais ce ne sont pas des risques tout. Ils préparent, savent où ils vont. « L’aventure est un risque que j’ai toujours cherché à éviter » écrivait Monfreid. Si Clara  préférait les types ordinaires, elle n’était pas pour lui, et il retournerait auprès d’Hélène Grimaud.

Brian réfléchit à cette volonté d’accaparement propre à l’état amoureux, mais aussi à l’espèce d’emprise masculine propre au désir de l’homme et décrit par Freud. D’ailleurs, Freud dirait que Brian surestimait sexuellement Clara, qu’il était dans une logique, plus encore que de sublimation, de surcompensation artistique, et qu’il fallait coucher pour rétablir l’équilibre. Une seule solution donc, pour ramener un peu de paix, faire l’amour ! En même temps, Brian  savait, avec Sartre, que ce qu’il appréciait aussi, chez Clara, c’était sa liberté, le fait même qu’elle lui échappait, et une fois cette liberté librement à lui aliénée, elle perdrait son charme. Et peut-être était-ce parce qu’elle savait qu’il lui avait asservi sa propre liberté qu’il n’avait pas d’intérêt, n’était pas un enjeu pour elle. Le paradoxe de l’amour, un sujet dont la liberté s’aliène librement et qui perd ainsi sa liberté, et donc la possibilité d’être aimé. Mais cela brisait Brian, ces atermoiements à n’en plus finir, et cette indifférence cruelle. Une nuit, las, il prit une cuite terrible et atterrit à l’hôpital, des années que cela ne lui était pas arrivé à cause de l’alcool. C’est, après le charme d’une entrevue avec une jeune et jolie infirmière psy, le Monstre, venu le voir, qui lui fit prendre conscience que sa Clara idéalisée était en fait froide et dure, moins humaine que ce que ses créations laissaient paraître. Elle savait qu’il souffrait, que son esprit s’était enflammé, et qu’une simple rencontre entre eux seuls aurait pu l’apaiser et lui ouvrir les portes du bonheur. Et elle se refusait avec obstination à lui ouvrir son cœur, un refus presque suspect, pathologique. Et comme le lui fit remarquer le Monstre, de guerrier à l’ancienne il se muait en lopette apathique, sa posture physique même se modifiait, il s’avachissait, et il déraillait psychiquement. Elle le détruisait. Signe de sa plongée dans l’abyme, son retour à Mishima et à sa fascination pour le Seppuku. « Le Soleil et l’acier », un dernier livre, un dernier acte, et puis Seppuku. Et un vrai, pas une simulation chorégraphique pour montrer les effets néfastes d’un excès de dureté conduisant à l’effondrement. Ca allait mal, vraiment très mal. Fallait, de toute urgence, se relancer dans l’action, se « Conradiser », se « LordJimer », et quitter le pays pour voguer vers une guérilla quelconque.

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