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31 décembre 2009 4 31 /12 /décembre /2009 18:29

Je suis un des rares fan de combat libre en France. J'attends avec impatience les résultats des différents événements (UFC , Strikeforce, Dream), comme pour le défunt Pride, et je regarde les combats avec un grand plaisir. Le MMA prend pour moi la place du foot pour le commun des mortels.

Etonnant de la part d'un philosophe à dominante psychanalytique, et, surtout, pour un pratiquant assidu d'aïkido, dont le but, la préservation de l'intégrité du partenaire/adversaire/agresseur est diamétralement opposé.

Alors pourquoi? Est-ce la pulsion de mort qui domine la pulsion de vie chez moi?
Peut-être mais pas seulement.
Indépendamment de l'aspect sauvage, avec montée d'adrénaline inhérente, le spectacle de ces confrontations est exceptionnellement intéressant pour les pratiquants d'arts martiaux et sports de combat. Ce n'est pas un hasard si on utilise surtout le terme de MMA ( mixed martial arts ) pour remplacer celui de free fight. Cela signifie que ce sport est surtout devenu une affaire de spécialistes, de techniciens hors pair, et qu'ils doivent combiner une connaissance à plusieurs niveaux pour rester au top, et maintenant y accéder.

Il est loin le temps ou le bourrinage (Tank Abott) suffisait pour se faire remarquer. Les combats de MMA sont ce qui se fait de mieux en termes de techniques. Le niveau est si élevé qu'il arrive par exemple que des spécialistes de lutte (Quinton Jackson) ou de bras de fer (Gary Goodridge) triomphent de combattants dans les règles des disciplines dont ils ne sont pas issus (pout le pied poing contre Cyril Abidi par exemple, spécialiste international de kickboxing "K1").

Au départ (premiers UFC 1993/94/95), il s'agissait de déterminer quelle discipline était la plus efficace. Royce Gracie surprit tout le monde avec son ju jutsu brésilien. Il amenait ses adversaires au sol, et soit les étranglait soit leur luxait un membre ( soumission ) ou bien il leur infligeait un ground and pound ( frappes au sol ) dévastateur. Tous ses adversaires furent ainsi ridiculisés.
Première découverte qui devait révolutionner le monde des arts martiaux, l'apprentissage du sol s'avérerait indispensable, et pour cela, le ju jutsu brésilien ( jjb ), synthèse de ju jutsu brésilien mise au point par Hélio Gracie, et axée sur le travail au sol, était le meilleur art.

Ensuite, on découvrit l'importance de la lutte, avec des types comme Dan Severn, Mark Coleman, Mark Kerr.
C'était intéressant de le combiner avec du jjb.

Mais tout ce qui était arts de percussions, comme la boxe thaï, le karaté, étaient décrédibilisés.

Puis, en la personne de Maurice Smith, champion de Kickboxing qui terrassa Coleman, champion de lutte, on se dit qu'avec quelques adaptations, aménagements, la boxe pied poing et le karaté kyokushinkaï qui y ressemble, avait son utilité. Il fallait simplement travailler les techniques de "sprawl" pour éviter les amenées au sol "takedowns", donc ajouter des techniques, des stratégies de lutte au pied poing pour que celui-ce devienne vraiment pertinent.
Mais si ces combattants d'un nouveau genre ne pouvaient pas contrer les projections "takedown', ils perdaient.
C'est ainsi qu'ils se mirent à acquérir des bases au sol, au cas où.

Les kickboxeurs travaillèrent donc beaucoup la lutte, et un peu le sol, et les lutteurs travaillèrent beaucoup les différents types de boxe et s'initièrent au sol façon jjb.

Les spécialistes de jjb se trouvèrent dépassés ( Royce Gracie prit une trempe lors de son retour contre le lutteur Matt Hughes, qui avait travaillé aussi sol et pied poing ).
Il leur fallut donc comprendre que leur art ne suffisait plus et, de toute façon, entre deux jjbistes, c'est surtout la compétence à un autre niveau qui créé la différence.
Donc, comme les lutteurs et les boxeurs, ils apprirent ce qui leur manquait, c'est-à-dire qu'ils renforcèrent leur lutte et leur pied poing.

On s'est aperçu aussi, avec le temps, que d'autres arts avaient leur utilité, comme le judo ( Yoshida ), le sambo ( Taktarov, Arlovski, Kharitonov, les frères Emelienenko ), le sanda ( Cung Lee), et tout récemment le karaté shotokan ( Lyoto Machida ) qui était pourtant méprisé jusque là.
Le MMA est en perpétuelle évolution, c'est pourquoi il est si intéressant. On ne sait pas de quelle nouveauté il s'enrichira.
La stratégie s'est elle aussi beaucoup modifiée.

Si un spécialiste de jjb ( comme Jacaré ) affronte un kickboxer ( comme Chuck Liddell), il devra l'amener au sol pour le finaliser. Il lui faudra donc tenir jusque-là, grâce à son travail en boxe, et son entraînement en lutte l'aidera dans ses amenées.
Le but du Kicker sera à l'opposé. Il lui faudra conserver le combat debout "stand up", et mettre son adversaire KO. Son travail de lutte lui permettra d'essayer de contrer les amenées au sol, et un apprentissage minimum du sol réduira les dégâts s'il s'y trouve engagé.

Un combat entre deux lutteurs se jouera sur la différence de niveau de l'un des deux au sol ou en stand up. Mais il peut y avoir des surprises. Par exemple, un lutteur qui a beaucoup travaillé sa boxe, et peu son sol, peut vouloir y faire la différence contre un autre lutteur censé s'être plus formé au sol où il voulait amener le combat. Et là, étonnement, ce dernier se révèle meilleur boxeur. Du coup, notre premier lutteur n'a plus de ressources, de solutions, puisqu'il fait face à un autre lutteur, dont il n'avait pas prévu la qualité de boxe, et qu'il ne peut compter sur un sol peu travaillé.

Tous les combats impliquent  donc une stratégie complexe en fonction des connaissances des 3 niveaux : le pied poing " stand up"; le corps à corps "clinch, takedown, sprawl"; le sol " positions défensives, soumissions, et ground pound".
Ce qui importe aussi, c'est l'aptitude à assurer les transitions entre ces différents niveaux, ce qui est encore autre chose.
Un combattant peut être bon dans les trois niveaux, et mauvais dans le passage de l'un à l'autre, la façon de gérer ce passage.
Et puis, bien sûr, la stratégie d'un combattant dépend de son adversaire.

Pour toutes ces raisons, expertise, stratégie, mais aussi pour le professionnalisme qui entraîne conditon physique optimum, coaching individualisé etc, le MMA moderne offre dans le monde des arts martiaux des rencontres sans équivalent sur le plan technique. Il suffit de détailler quelques profils de combattants pour s'en rendre compte :

Brock Lesnar :                               -120 kilos de muscles ; champion  des USA de lutte ;entraînement complémentaire  
                                                         en boxe

Chuck Liddell :                               -champion du monde de kickboxing ; entraînement approfondi en lutte.

George St Pierre :                         -ceinture noire de Kyokushinkaï ;  niveau national en lutte au Canada ; ceinture                                                            noire de jjb  
                                                       
Anderson silva    :                         -champion de boxe thaï du Brésil, niveau minimum en lutte, ceinture noire de jjb

Rodrigo "minotauro" Nogueira : -niveau international en jjb ; niveau national en boxe anglaise


et le meilleur de tous, Fedor emelienenko : - champion d'Europe de judo par équipe avec la Russie ; multiple champion du monde de sambo ; niveau international en pied poing.

Et après ça, étonnez-vous que les combattants unidimensionnels prennent une trempe, comme Mark Hunt ( pourtant 118 kilos , champion du K1 ) ou Ogawa ( multiple champion du monde de judo poids lourd ) quand ils s'essaient au MMA. C'est dire le niveau !

Teddy Riner lui-même aurait-il une chance ? Le judo ne lui suffirait pas en tout cas.
r
Les vieux mythes ( Rickson Gracie, Bas rutten ) se feraient balayer s'ils revenaient.

Et pour finir : Les Japonais sont les premiers fans de MMA dans le monde. Vu le niveau technique des Japonais en général, on comprend que ce n'est pas que pour la violence qu'ils le plébiscitent, mais essentiellement pour la richesse des techniques appliquées.

 
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