Si pour un matérialiste conséquent, le libre-arbitre est une fiction, l'égalité entre les hommes également.
Il est facile de s'entendre sur l'égalité mensongère des conditions, la transmission des privilèges, le domaine de l'acquis se parant du masque de l'innée et s'en vantant (Bourdieu),. Les droits réels sont à distinguer des droits concrets (Marx).
Cependant, d'un point de vue plus profond, c'est l'égalité métaphysique entre les hommes à laquelle un matérialiste ne peut pas adhérer. Pour lui, en effet, il n'y a pas derrière les différences empiriques une essence d'ordre religieux à laquelle participerait tous les hommes, et qui serait plus essentielle que les différences.
Non, comme le dit Montaigne, "il y a plus de différences de tel homme à tel homme que d'homme à bête".
Il n'y a en effet pas d'homme, mais que des corps , et des consciences plus ou moins profondes en raison de la complexité de ces corps (loi de complexité-conscience Teilhardienne, manifestation du vouloir-vivre à des degrés divers chez Schopenhauer etc), des corps donc, qui portent des potentialités plus ou moins fécondes.
Ainsi, Balzac était plus intéressant que moi. Il m'était supérieur. Il ne l'est plus. Le pauvre a perdu son corps. Comme c'est triste de penser que la larve, l'insecte ont plus de valeur que ce qu'il est actuellement, rien ou quelques os.
Mais entre moi vivant et Balzac vivant, nulle égalité. Une hiérarchie, une différence qualitative. La fameuse phrase de Sartre: "Tout un homme, fait de tous les hommes, et qui les vaut tous, et que vaut n'importe qui", me semble ridiculement égalitariste et démagogique.