Au fond, la seule chose qui intéressait Brian, les femmes, était la seule qui incessamment lui échappait. Il y avait là comme une malédiction, une fatalité, une tragédie. Il en avait eu, mais pas celles qu'il voulait. Et quand des femmes qui lui plaisaient lui disaient qu’il leur évoquait son ex, il entendait, mais ne parvenait pas vraiment à y croire, tant son image de soi était détériorée. Désormais, il avait l’impression qu’il ne charmait plus les jeunes filles. Il ne savait pas comment vivre avec ça, avec cette conscience d’être passé à côté de tout, et cette souffrance permanente, quotidienne. Comme l’écrit Romain Gary « Au-delà de cette limite, votre ticket n’est plus valable ».
Il ne pouvait, quand il était plus jeune, draguer, tant sa crainte d'être rejeté était intense, et lorsque les femmes l'abordaient, le sollicitaient, ce qui sauvait son narcissisme, il était bloqué pour deux raisons. D'une part, il se disait qu'elles pouvaient être séduites de loin, mais qu'elles s'apercevraient à quel point il était idiot, stupide, et vide, si elles s'approchaient. Et puis, le rapprochement des corps générait en lui une angoisse insoutenable. Il était submergé par l'émotion. Ca le dépassait, et il était poussé à s'enfuir, comme si la présence du corps féminin, du désir féminin, était intrusif et l'agressait.
Et il lui avait fallu des années pour surmonter tout cela.
Heureusement, en s'ouvrant, les possibilités de rencontre se multipliaient à nouveau. Il n'était plus la bête sauvage qu'il était autrefois. Il avait récemment eu un bon contact avec une femme mi yéménite, mi indienne, rencontrée dans un bar. Et une femme dont l'expression des yeux était formidable, et douée d'intuition comme si elle était une âme soeur, l'avait poussé à s'exprimer et à sortir de lui-même, ce qui lui avait apporté bien plus que son entraînement ou ses lectures quotidiennes, mais avait aussi appuyé là où ça faisait mal, lui avait révélé une nouvelle fois comme il souffrait de ce qui lui manquait. Il en avait perdu le goût de lire.
Il était temps de repasser à l'action.
Il avait laissé passer le temps avec Maria et il avait des infos qui lui laissaient peu d'espoir. Comme dans la chanson de Johnny Hallyday, "Oh Marie... Evanouie mon innocence, tu étais pour moi ma dernière chance, peu à peu tu disparais, malgré mes efforts désespérés".
Et Clara, dont il avait besoin, à qui il aurait pu apporter des choses, qui aurait pu lui apporter beaucoup, ne lui avait laissé aucune chance.
Dur de repartir. Buter Laurent Jolloré avec le "Monstre", c'était aussi redevenir un guerrier froid, fermé, implacable. Il le fallait.