Toute notre société Occidentale est fondée sur le Judéo-Christianisme.
Même Descartes, qui a bâti sa méthode en réaction aux spéculations oiseuses de la scolastique, a établi une stricte séparation entre l'âme et le corps, unifiés par une Substance mystérieuse.
Cette laïcisation de principes religieux erronés a modelé les orientations culturelles, juridiques de notre société.
C'est pourquoi l'animal a pu etre considéré comme un pur automate, puisqu'il ne "pense" pas. Le tuer, lui faire subir mille atrocités, s'en rendre "maître et possesseur" de toutes les manières possibles, etaient donc permis, légitimés, dédramatisés.
Certaines sociétés traditionnelles imposent des rites spécifiques lorsque ses membres tuent un animal. Par ses rites, elles reconnaissent, avec la nécessité de tuer pour subsister, l'importance, la gravité d'un tel acte, qui supprime une vie. La divergence des conceptions modernes et primites de la vie implique des conséquences qui ne plaident pas en notre faveur.
De même, la notion de liberté, et donc de responsabilité individuelle, résulte de la croyance en la possibilité d'une sorte d'âme absolument inconditionnée. Comment se fait-il que ce genre d'âneries détermine encore toute l'organisation sociale?
Que l'homme soit partiellement déterminé par son inconscient, par son rôle social, par son propre corps, par un enchaînement complexes de causes et d'effets, cela a été l'objet des réflexions de Spinoza, de Marx, de Freud, de Darwin, de Foucault, de Claude Lévi Strauss, de Bourdieu, et de tant d'autres.
Aussi, lorsqu'un criminel est jugé pleinement responsable de ses actes, cela n'a pas de sens. Par définition, s'il était pleinement responsable, il aurait prévu les conséquences de son acte. Et s'il les a prévues, et qu'il n'a pas pu s'empêcher de commettre l'irréparable, sa responsabilité est encore diminée, puisqu'il s'avérait incapable d'agir contre ses impulsions, ses tendances, ou de les détourner. Cela ne devrait pas renforcer la peine du fait de la préméditation, car, et c'est logique, cela révèle des complexes d'une profondeur bien plus difficilement maîtrisable, et une absence quasi totale d'intériorisation du principe de réalité.
Cet homme n'est tout simplement pas parvenu à concilier principe de plaisir avec principe de réalité. C'est l'ignorance de sa situation qui l'a piégé. "Nul ne fait le mal volontairement".
Même lorsque l'on altère la responsabilité d'un individu par des circonstances atténuantes, on ne voit pas qu'en réalité, il n'y a que des circonstances atténuantes, qu'il ne peut y avoir que cela.
L'homme est un animal doué de raison, mais en tant qu'animal, il ne cherche qu'à survivre, à s'exprimer, à s'en sortir. La raison peut l'aider dans son entreprise, mais elle le plombe aussi en ce qu'elle le rend conscient de sa mort à venir, d'où 2 seules conséquences possibles : -soit la fuite psychique dans le délire religieux ( qui est folie, inadéquation avec le réel, mais permet de tout accepter ),
- soit l'extrême et angoissante urgence de se réaliser.
Un homme qui commet un crime, un délit, n'a pas eu l'intelligence suffisante de la situation pour à la fois se réaliser individuellement, et s'adapter aux exigences et normes sociales en cours.
Mais j'irais bien plus loin. Je dirais qu'en réalité, il faut renverser les perspectives, et comprendre que non seulement, il y a des hommes irresponsables, mais qu'aucun homme n'est réellement et totalement responsable, et que l'homme le plus libre qui soit, c'est-à-dire dont la compréhension de sa situation est la plus adéquate à la réalité, n'est pas à l'origine/le responsable de sa propre accession à ce niveau de prise de conscience ( Spinoza ).
Par conséquent, la société est toujours aussi "responsable" que le criminel, et certaines sociétés primitives, qui expient toutes entières les écarts de conduite d'un de leurs membres, membre qu'elles n'ostracisent pas puiqu'elles comprennent ses actes criminels comme imbriqués dans l'ensemble dont ils sont issus, sont beaucoup plus justes, au point de vue logique et moral, que nos sociétés développées.
Les droits de l'homme sont eux aussi contestables, ne serait-ce que parce qu'ils ne sont qu'une vue de l'esprit. D'abord parce que ses fondements, liberté et égalité, sont purement abstraits. ( "il n'y a pas de liberté pour celui qui crève de faim"=Marx). Ensuite parce qu'ils ont été récupérés par la bourgeoisie et son idéologie dominante ( droit de propriété notamment ).
Mais, surtout, parce que les implications des grands principes sont éhonteusement méprisés.
On ne torture plus explicitement, mais on place les criminels dans des prisons où ils se font torturer. L'institution le sait et le permet. Comment l'individu emprisonné pourrait ne pas lui en vouloir ? Ce n'est bon ni pour lui, ni pour la société, dont il n'aura de cesse de se venger.
On critique les jugements sommaires pratiqués par d'autres pays moins élaborés. Est-il plus humain d'enfermer des hommes pendant 5,10,20,40 ans pour des crimes dont la responsabilité ne saurait leur être imputée scientifiquement ?
On critique la peine de mort, comme si on avait évolué depuis, mais qui y étaient condamnés dans notre pays? Les criminels dont la "faute" était la plus lourde.
Par conséquent, ce sont ceux qui ont écopé, à la place de la peine de mort, de la perpétuité.
40 ans dans un trou, à se faire humilier, et à se torturer à la pensée, juste d'ailleurs, qu'ils ont raté leur vie, que la vraie vie est ailleurs!
C'est pas sûr qu'ils gagnent au change !
Ils y gagneraient si les conditions de détention changeaient véritablement, si elle permettaient un progrès des détenus dans la compréhension de leur situation, et une heureuse réinsertion. Encore faut-il que l'atmosphère entre détenus ne soit pas constituée de tensions permanentes, tensions dont l'administration est responsable, car soit elle les favorise, soit elle ferme les yeux.
On comprend là encore que la justice expéditive "d'un coup de lance", qui nous paraît abominable, est dans les faits bien moins cruelle que notre justice dont la principale fonction est de créer des psychotiques à la chaîne.